Mariam, miraculée du régime Assad

Mariam, miraculée du régime Assad

Source: JDD papier

 

RENCONTRE – Elle ressemble à n’importe quelle jeune femme, n’importe quelle touriste. Menue, pas très grande, elle surfe sur son téléphone. Assise sur les bords de la fontaine, Place du Châtelet, Mariam Hayed n’est pourtant pas n’importe qui. Elle est marquée par une histoire tragique dont elle s’est sortie. Mariam Hayed est une miraculée du régime de Bachar El-Assad.

Mariam, miraculée du régime Assad
Mariam Hayed, miraculée du régime de Bachar El-Assad. (Jérôme Mars pour le JDD)
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Lundi soir, la jeune femme de 26 ans prendra la parole au cours d’une soirée organisée par l’association Souria Houria (Syrie Liberté) qui se tiendra à la Mairie de Paris, à l’occasion de la Journée des Droits des femmes. En partenariat avec Women Now For Development (SFD) et avec le soutien de la MaIrie de Paris, Vague Blanche et l’association Fonds pour les Femmes en Méditerranée, la soirée rendra hommage à la femme syrienne. Le débat modéré par Hala Kodmani sera suivi de témoignages. Celui de Mariah Alabdeh qui racontera comment résilience rime avec résistance pour certaines syriennes. Pour Lina Muhamad, ce sera l’expression de l’espoir dans un montage vidéo. Et enfin, il y aura Mariam Hayed et son terrible témoignage.

 

Mariam ou la dignité absolue

Lorsqu’elle se souvient, revient en arrière, s’étonne, se reprend, Mariam est animée d’un sourire qui emporte tout, et qui fait oubier que ce qu’elle vous raconte n’a rien de banal et qu’elle a enduré un calvaire. Un an, dans les geôles du “boucher de Syrie”, Bachar El-Assad. Difficile à mettre sur un CV. Que dire de cette partie de sa vie? Mariam s’en tire avec une élégance et une modestie renversante. Le 15 octobre 2014, des coups sont frappés à la porte de la maison où elle habite à Mashrou Dumar, dans la banlieue de la capitale syrienne. Ce jour-là, le vieux monsieur qui est le propriétaire et son room mate, un étudiant comme Mariam, sont présents. Le reste relève d’une tornade noire. Bousculade, fouille, cris, insultes et yeux bandés. Le propriétaire est relâché, les éudiants sont embarqués.

 

Aux mains de la Criminal Security Branch

Direction la prison. “Ils ne nous ont pas dit de quoi, on était accusé. Ils nous ont frappés, insultés et nous ont fait nous déshabiller”. Mariam est aux mains de la Criminal Security Branch. Elle restera dans cette prison soixante-sept jours. Pas de visite. Elle a comme disparu de la surface de la terre. Sa famille ne saura rien. Il y a une cellule pour femmes. “J’étais la seule prisonnière politique”. Pas grande la cellule, elle accueille pourtant au mieux, une vingtaine de détenues, au pire jusqu’à une cinquantaine. Impossibe de s’allonger pour dormir. Les détenues organisent des tours. Très vite, il y a le chantage. Une vidéo dans laquelle la jeune étudiante, en dernière année de psychologie, avouerait des activités terroristes et elle échapperait ainsi, à la perpétuité. Mariam confesse une participation aux manifestations mais c’est tout. L’homme qui lui parle veut qu’elle répète les paroles qu’il lui assène. “J’en étais incapable. Je lui ai dit : ‘Vous m’avez tellement battue que ma mémoire ne fonctionne plus comme avant’.” Elle sera accusée de terrorime et transférée dans la prison d’Adra.

 

Elle franchit les murs, le 15 mars 2015. Elle aura deux avocats. Elle sortira la 25 décembre 2015, moyennant la somme d’un million et demi de lires syriennes. Mariam n’a plus de papiers. Une vielle dame qui vient d’Alep, où vivent encore ses parents, va l’aider à quitter Damas. Le duo mettra dix longues heures à atteindre une ville rongée par les bombardements et les groupes armés. Elle y reste un mois, puis rejoint Gaziantep, en Turquie, par des voies illégales. Une ONG allemande l’a prend sous son aile, puis ce sera SFD. Lundi, Mariam n’a pas l’intention de s’étendre sur ses malheurs. Elle sait déjà qu’elle va marteler : “Nous gagnerons, cela prendra du temps mais nous y arriverons.”

 

Mariam Hayed. (Jérôme Mars pour le JDD)

 

“Nous ne sommes pas que des victimes”

Parce que tel est le message de la soirée de lundi. “De tout ce qui parvient de Syriedans les médias occidentaux, ce sont des images de mort, des images de Daech,soupire tristement Maria al-Abdeh, franco-syrienne et directrice exécutive de Women Now for Development. Mais la vie continue là-bas, et ce serait bien de ne pas nous regarder uniquement comme des victimes”. Elle aussi prendra la parole lundi soir pour raconter la souffrance du peuple syrien bien sûr, mais surtout pour expliquer autre chose.

Autre chose comme ces femmes qui font des kilomètres pour venir apprendre l’anglais, pour s’éduquer ou apprendre un métier. Parce que le paradoxe de cette tragédie, c’est qu’un grand nombre d’entre elles se trouvent désormais à la tête de famille qu’elles doivent être en mesure de nourrir. “Oui, c’est paradoxal, admet Maria al-Abdeh, mais elles le disent toutes désormais aujourd’hui, ‘on peut vivre sans eau, ni électricité, on peut se priver de manger, mais on ne peut survivre sans s’éduquer’. Ces femmes syriennes sont en train de construire le leadership de demain dans une nouvelle Syrie”.

Source: JDD papier

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